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A l'ombre du feu 2 - Rainlight {Chapitre 13}

Publié le par danouch

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Chapitre 13

Premier contact

 

Le transfert a été long, il lui a semblé que le voyage a pris une éternité, Il lui a fallu traverser l'océan après tout. Après des mois de négociation avec son nouvel avocat et d'entrevues avec le juge, le voilà transférer dans la prison de haute sécurité de Florence dans le Colorado, Etats Unis. De nouveaux papiers également en poche, il a enfin pu dire adieu à son premier nom d'emprunt pour devenir Neven Roarke. Quand il a touché son passeport c'est comme si on lui avait donné une seconde chance. Une chance qu'il ne pourra réellement saisir que dans un an.

La prison de haute sécurité de Florence, l'une des plus sécurisé de tout le pays, l'un des arguments majeur de son avocat pour que son transfert soit accepté en plus du fait qu'il ne lui reste qu'une année.

 

- Vous ne comprenez pas. C'est peine perdue. Ne le prenez pas mal mais vous ne savez rien de mon dossier. Avait rit Neven en voyant le jeune promu que lui avait envoyé son frère.

L'avocat avait simplement remplacer ses lunettes sur son nez, sans sourire il avait continué de prendre des notes sur son grand calepin.

- Ne le prenez pas mal mais n'essayez pas de m'apprendre mon métier, Monsieur Petrovic. Ou devrais je vous appeler Monsieur Roarke ?

- Roarke ? C'est le nom de Milos.

- Non c'est votre nouvel identité également, comme celle de votre frère Sima. Lentement il lui avait fait glissé son passeport sur la table.

Neven l'avait saisi avec étonnement, incapable de comprendre avec quelle rapidité il avait réussi une telle prouesse.

- Ce n'était pas compliqué. Les lois internationales sont très protectrices du regroupement familiale. Ce sont celles-là mêmes qui vont m'être utiles pour vous faire transférer aux Etats-Unis. En plus du fait qu'il ne vous reste que deux ans. Je suis déçu, Milos m'avait promis un dossier plus compliqué. Un léger sourire sur les lèvres en direction de Neven.

 

Plus que confiant, l'avocat avait quitté la cellule d'un pas déterminé laissant Neven perplexe et rassurer à la fois. Il lui avait même arraché un petit rire devant une telle assurance. Il en avait connu des avocats mais celui là était vraiment particulier et visiblement très doué ou bien il le feignait bien.

 

En tout état de cause, il ce n'était pas un rôle puisqu'un an plus tard le voilà aux portes de sa nouvelle demeure et Aaron O'connor est là pour l'accueillir. Il s'avance jusqu'à lui, pianotant sur son smartphone jusqu'à l'atteindre.

 

- Vous avez été trop long. S'exclame brusquement Aaron en direction des trois militaires de l'armée britannique qui les escortent. Vous êtes venus en planeur ?

- Nous avons eu du retard au décollage. Se justifie l'un d'eux.

- Du retard au décollage ? Il me semblait pourtant que vous aviez un avion privé ? C'était même une condition déterminante de ce transfert, que Monsieur Roarke a payé de sa poche je dois vous le rappeler, à moins que ces fonds aient été utilisés pour autre chose et que vous avez pris un pauvre petit coucou en lieu et place de notre jet ?

- Nous avons respecté nos engagements Maître O'connor.

- C'est moi qui en déciderait.

 

Aaron s'est arrêté devant les portes de la prison. Neven n'écoute même pas et se contente d'observer les murs, a part le fait qu'il soit pratiquement au milieu du désert du Colorado, la prison n'est pas si différente que celle de Londres. Les mêmes défauts de sécurité. Peut être qu'il y en a plus, la seule réelle contrainte à ses yeux est ce désert, aucune montagne, pas d'abri et un soleil de plombs. Il se ferait vite rattraper.

 

- Vous pensez encore trop comme un agent du MI6. N'oubliez pas que vous devez purger votre année tranquillement. Pas de faux pas, sinon notre accord tombe à l'eau et vous repartirez immédiatement pour Londres sans doute pour un nouveau procès. Lui a murmuré Aaron.

Neven ne l'a pas senti s'approcher aussi près, tous d'eux regardent maintenant la tour de guet qui dépasse de tous les autres bâtiments. Cette même tour qui doit surplomber la cour des prisonniers.

- Je serai sage, sourit avec une certaine moquerie Neven.

- Je n'en doute pas, lui répond Aaron avec le même sourire.

L'avocat remonte ses lunettes sur son nez et avance dans le hall d'entrée suivit par Neven toujours escorté.

- C'est en tout cas une aubaine pour nous, lui dit Aaron avec lui dans la salle de change.

Neven retire ses anciens vêtements, il se saisit de sa nouvelle tenue orange. Aaron pianote toujours sur son téléphone, tranquillement assit au fond de la salle.

 

- Vous êtes à des kilomètres de votre famille, ils vivent dans l'état voisin mais il y quelqu'un ici qu'il vous faudra protéger.

- Je le sais.

- Vous le savez ? Peu importe. C'est très important pour votre frère que vous restiez à ses côtés.

- Ca aussi je le sais.

- Alors tant mieux. Aaron range son téléphone, Neven a fini de s'habiller. Vous êtes magnifique, se moque encore l'avocat. Très chic.

- Je vous la prête si vous le voulez.

- Ca ne m'irait pas au teint.

 

Aaron se lève il s'approche de Neven, son sourire moqueur devient plus compatissant.

- Je ne peux pas avancer plus loin de la prison. Ils vont vous conduire dans votre cellule et ensuite ça sera à votre tour de jouer.

- Je vous remercie de vous inquiétez pour moi mais j'ai déjà fait dix ans dans une autre prison.

- Vous avez raison. Je continuerai d'être votre avocat mais nous nous verrons beaucoup moins.

- Vous allez vous mettre à pleurer ?

- Ne soyez pas cruel, j'ai fini par m'attacher à vous Monsieur Roarke. Vous n'êtes pas aussi idiot que vous en avez l'air.

- Je suis flatté.

 

Pas une seule fois Aaron ne l'a regardé dans le yeux, il a continué de faire le tour de sa silhouette dans sa tenue orange, plus petit que Neven, ça n'a pas été difficile pour lui de trouver d'autres points d'intérêts pour éviter de lever la tête. Il est vrai qu'ils ont passé beaucoup de temps ensemble durant cette année, ils ont fini par s'apprécier au delà de leur relation professionnelle. Pour une fois, en dix année, il a été la personne la plus proche de lui avec qui il a pu parler naturellement, avec qui il a pu à nouveau s'amuser.

 

- Ce n'est qu'une année Maître, nous nous reverrons.

- Soyez prudent. Vous connaissez déjà certains de vos codétenus, vous connaissez leur réputation.

- Et vous connaissez la mienne.

 

Neven sort de la salle de change, les gardiens de la prison l'emmènent de l'autre côté des barreaux, sous le regard inquiet de son avocat qui est maintenant incapable de l'aider d'avantage. Son travail se termine ici pour le moment. Tandis que celui de Neven vient à peine de commencer.

Dans la cafeteria de la prison, il ne lui a pas fallu chercher longtemps pour réparer sa mission. Au bout d'une table, les cheveux blond attaché en queue de cheval, une bonne barbe et la peau brunie par le soleil faisant ressortir son regard doré encore plein de hargne. Neven se sent soulagé, son esprit est loin d'être brisé mais la longue cicatrice encore rouge sur son avant bras montre que le séjour n'a pas été de tout repos.

 

- Michael von Ham en prison. C'est quelque chose qu'il faut voir pour le croire. Lui dit Neven debout devant sa table.

- T'as vu, maintenant casse toi, il marmonne en mâchant son pain sans relever les yeux.

- Je m'excuse par avance mais il va falloir que tu me supporte encore un peu.

Michael relève enfin la tête, il fronce légèrement les sourcils on remarquant le regard émeraude de Neven.

- Je sais, on se ressemble tous dans la famille.

- Tu ne lui ressemble pas, tu es loin de l'égaler..., lui dit soudainement Michael comprenant de qui il s'agit.

- Nous sommes d'accord. Neven s'assoit avec son plateau. Mais moi tu peux me voir et moi je pourrai le voir.

- C'est lui qui a organisé ça ?

- Qui veux tu que ça soit ? Tu as d'autres amis ?

- Je n'ai jamais eu d'amis. Je n'ai que lui.

- Bien. Alors nous sommes liés quoi qu'il arrive.

 

Neven mange tranquillement, il jette un regard vers son voisin de table qui se perd dans ses souvenirs, plus loin il remarque un autre détenu intéressant, une joyeuse coïncidence. Ou pas.

 

* * *

 

Aaron O'connor arrive enfin à destination après un trajet en avion et de longues minutes en taxi. Il sonne à la porte de la villa complètement épuisé, alors qu'il allait recommencer la porte s'ouvre soudainement.

 

- Bonjour ? Une petite fille lui fait fasse, intriguée.

- Bonjour. Tu dois être Stella, tu peux aller chercher ton papa ou ton tonton ?

- Qui est là ? S'exclame une voix masculine en s'approchant.

 

C'est Sima qui se présente devant lui, Aaron le reconnaît immédiatement. Il a encore ses longs cheveux et un accent bien prononcé. Neven est le plus âgé et pourtant il a le visage bien moins fatigué que son jeune frère. Ils n'ont pourtant que deux ans de différence. Neven a passé dix ans en prison mais il est plus enjoué, en meilleur forme physique et il a une excellente vivacité d'esprit. Son entraînement doit y être pour quelque chose, à moins qu'il soit naturellement plus attrayant.

 

- Maître O'connor, vous m'écoutez ?

- Oui. Oui. Désolé. Je reviens de la prison, je voulais en parler avec Milos.

- Il est sorti mais rentrez. Je vais faire du thé en l'attendant. Comment va Neven ?

Aaron entre dans la villa, il retire ses lunette et se frotte l'arrête du nez, rattrapé par la fatigue des nombreux voyages.

- Fidèle à lui même. J'ai l'impression que la prison a été une véritable promenade de santé pour lui.

- Neven a toujours été comme ça, sourit Sima en remplissant la bouilloire d'eau. Déjà quand nous étions jeune il aimait se mettre en danger, une véritable tête brûlée et n'avait peur de rien. C'est lui qui était en charge de la chasse, il était le seul à pouvoir manier le fusil alors qu'il avait à peine douze ans. De nous, il était celui qui pouvait le mieux s'en sortir.

- Il a quand même fini en prison.

- Vous l'avez dit vous-même, c'est une promenade de santé.

 

Stella décide de se retirer avec ses poupée et de jouer à l'extérieur sous le soleil laissant les deux hommes seuls.

 

- Vous avez pu retrouver Andreï ? Lui demande Sima.

- Notre détective privé continue ses recherches. Il serait peut être en Asie. Il est très doué pour se cacher.

- Ou alors c'est votre détective qui ne l'est pas.

- C'est lui qui a aidé Koran Hamley à vous retrouver. En moins de deux semaines.

- Et il lui faut plus d'un an pour un homme seul.

- Un homme qui sait se rendre invisible.

- Andreï ? Vous confondez avec un autre frère.

- C'est vrai que vous avez vécu longtemps ensemble. Je ne peux pas lutter.

 

Aaron sirote son thé l'air victorieux devant le silence de Sima, pas vraiment rancunier pour un sous il secoue la tête en laissant échapper un petit rire sarcastique.

- J'imagine que Neven doit vous apprécier. Vous ressemblez beaucoup à cette fille.

- De quoi vous parlez ?

- Sima !?

 

Milos débarque dans le salon, un sac à dos sur les épaules, en tenue de sport.

- Qui a gagné ? Lui demande Sima en tournant la tête vers son frère.

- Lucius. Comme toujours. Je déteste ce sport.

- Pourquoi tu continues ?

Il hausse les épaules en récupérant une bouteille d'eau dans le réfrigérateur, il s'approche d'Aaron et lui tend la main.

- Comment allez vous ? Lui demande Milos heureux de le revoir.

- Je vais bien. Je reviens tout juste de la prison.

- Bien. Neven a été correctement transféré ?

- Plus ou moins. Je verrai avec nos négociants. Je finalise les papiers demain matin.

- Très bien. Où est notre toute nouvelle acquisition ?

- Tout va pour le mieux. Nous devrions également pourvoir signer les papier d'ici quelques mois. Le temps de constituer le dossier par le notaire.

- Tu as acheter quelque chose ? Demande Sima.

- J'investis dans la pierre, sourit Milos. Rien de particulier.

- Je vous organise une visite à la prison pour ce week end. C'est un peu tôt mais après le temps qu'ils ont mis pour transférer le détenu, je pense que ma requête ne sera pas rejetée. Je vais vous laisser maintenant.

- Je vous remercie Maître. Si vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas.

- C'est à moi de vous remercier. Messieurs.

 

Aaron sort de la villa sans attendre qu'on l'accompagne. Il appelle son taxi et marche jusqu'au bout de la rue, une étrange sensation sur ses épaules. Une déception venue de nulle part qui lui donne un goût amer dans la bouche, peut être à cause de son devoir, ses obligations celle là même qui lui imposent des limites.

Il n'est que l'avocat de la famille, rien de plus, rien de moins. Aaron arque un sourire un peu triste.

 

- Depuis combien de temps est-ce que tu connais ton avocat ? Demande Sima.

- Des années. Via d'autres connaissances. Ils en avaient tous peur. A peine sortie de son école, il a réussi à faire plier beaucoup d'entre eux et ça m'a amusé. J'ai décidé de l'engager à temps plein pour s'occuper de toutes mes affaires quand Michael a été arrêté et il a accepté.

- Il est très jeune.

- Tu as quelque chose contre lui ? S'interroge Milos.

- Non. Juste...Rien. Je suis un peu de mauvaise humeur en ce moment et je crois je n'ai pas été très correcte avec lui tout à l'heure.

- Ne t'en fais pas pour lui. Il ne t'en tiendra pas rigueur, il est très professionnel.

Milos enlève son t-shirt plein de sueur. Il se dirige vers les marches qui le mène vers la salle de bain à l'étage.

- Ce n'est pas la question, je sais pas il...Il a passé beaucoup de temps avec Neven, non ?

- Ouais...Quel est le rapport ? Dit il au pied de l'escalier.

- J'en sais trop rien...J'ai un pressentiment mais je saurai pas dire quoi.

Milos arque les sourcils.

- Quand tu auras trouvé, tu me diras. Sourit Milos. Je vais prendre ma douche.

- Ouais...

 

Stella revient dans le salon, sa poupée pleine de boue dans les mains.

- Papa, je crois qu'elle veut aussi prendre une douche.

- Effectivement...

 

Milos passe par sa chambre avant d'entrer dans sa salle de bains, il jette ses habits salle dans un coin de la pièce, il remarque alors une enveloppe sur sa commode libellé à son nom. Il s'arrête quelques secondes devant l'enveloppe, pas d'autres inscriptions, il la retourne, penche légèrement la tête puis il l'ouvre.

 

« Salut Milos,

 

Comment tu te sens ? J'espère que tout va pour le mieux pour toi. De toute façon tu n'aura pas l'occasion de me répondre alors tu n'as pas le choix d'aller bien.

Tu dois certainement te demander comment j'ai fait, qui, quoi, comment ? Evites toi un affreux mal de tête et contente de lire cette lettre.

Tu es le seul à qui je veux bien donner de mes nouvelles, peut être parce que j'en avais moi-même besoin ; garder un contact avec vous tous. Je ne t'ai pas vraiment choisi, disons que le choix s'est imposé de lui-même. Si je l'avais envoyé à Lucius, il n'aurait même pas pris le temps de la lire qu'il serait déjà entrain de fouiller tout le pays à la recherche de mon complice. Si je l'avais envoyé à Moïra, le résultat aurait été le même et si je l'avais envoyé à Lysandre...Je crois qu'il ne s'en saurait pas remis...

Vous me manquer, vous me manquer tous autant que vous êtes. J'aimerai tellement être auprès de vous. Je vais bien tu sais, j'ai réussi à m'installer pour un petit moment. N'essayez pas de me retrouver, c'est une perte de temps et d'argent. S'il te plaît Milos, il n'y a qu'à toi à qui je peux le demander mais empêches le d'essayer de me retrouver. Je veux qu'il vive, je ne veux pas qu'il gâche ses belles années pour moi. Fais en sorte qu'il réalise son rêve et un jour peut être nous nous reverrons.

Je t'aime. Je serai incapable de te le dire de vive voix mais tu dois savoir ce que je ressens. Je t'aime. Je vous aime tous. Je l'aime lui.

Je t'enverrai peut être d'autres lettres mais n'essaies pas de me répondre et n'essaies pas de savoir qui te les apporte.

 

A bientôt

Andreï. »

 

- SIMA !!!!

 

* * *

 

Koran a réussi à se cacher dans une boutique en ruine. Une vieille construction de bois qui a été ravagée par des ouragans et qui n'a jamais été restaurée. L'arme contre la poitrine, essoufflé, Koran essaie de garder la tête froide, d'écouter le moindre bruit autour de lui. Soudainement des bruits de pas se font entendre autour de la boutique, des hommes parlent dans la langue locale. Koran saisit quelques mots, il coupe quasiment sa respiration pour se faire invisible puis plus rien. Les hommes s'en vont. Koran reprend sa respiration l'arme toujours contre sa poitrine.

Il est temps de quitter le pays mais des mercenaires ne cessent de le pourchasser, ils deviennent de plus en plus efficaces et même après avoir perdu sa trace, ils le retrouvent bien plus rapidement qu'au départ. Ils sont plus nombreux et son nom commence à circuler parmi les habitants, ainsi que sa description. Koran doit être encore plus rusé, se cacher dans l'ombre et ne plus sortir de jour. Sa peau est trop clair, ses cheveux trop brillant et malgré la terre qui collent à sa peau en sueur, il est trop visible.

Il doit partir, dès que possible. Koran prend une profonde inspiration, il reste acccroupi au sol et parcours la petite salle dévastée de la boutique. Caché derrière le comptoir il trouve un bidon à moitié plein d'essence, il le récupère et continue de s'avancer jusqu'au fond. Des planches du mur sont assez écartées pour que son corps puisse s'y glisser. Non sans effort, il s’extirpe sans bruit de la vieille structure. Au loin il voit les feux qui éclairent les diverses habitations, dans la nuit il peut encore rester caché dans la végétation dense qui entoure le village mais ce n'est pas vers les habitations qu'il doit s'orienter.

Toujours accroupi il court dans l'ombre jusque dans la jungle, il doit longer le chemin qui le conduit hors du village sans jamais être à découvert.

 

- Par là ! Un tigre !

 

Merde ! Koran se relève il court aussi vite qu'il peut tandis que les premiers coup de feu retentissent. On le prend pour un fauve tueur d'homme, si tout le village se met à le poursuivre ça va être plus compliqué. Il n'a pas le temps de réfléchir et s'enfonce d'avantage dans la jungle en sachant pertinemment qu'au delà du fait que des mercenaires pourraient le tuer, d’innombrables animaux pourraient le dévorer.

Il évite les premières balles qui se plantent dans les troncs d'arbres, la jungle devient de plus en plus impraticable, plus aucune lumière ne traverse les immenses feuillages et les racines deviennent aussi grosses que les troncs eux-mêmes. Une nouvelle balle passe à côté de son visage mais les voix deviennent plus lointaines. Koran décide de se cacher, il patiente, son entraînement refait surface, il prend une profonde inspiration et range son arme dans son dos. Son premier poursuivant s'approche, ils ont arrêté de tirer. Les plantes lui donnent une parfaite maîtrise de son camouflage, il fait ralentir les battements de son cœur tandis que ses paupières cessent complètement de cligner. Le calme dans sa tête, son souffle éteint, l'homme n'est plus qu'à quelques centimètres. Il peut sentir l'odeur de la boue à ses chaussures, ses lèvres qui laissent échapper son souffle saccadé et la chaleur qui s'évapore de son fusil.

Soudainement il se relève, lui plaque la main sur sa bouche, récupère son fusil en le jetant à terre puis il lui brise la nuque. Le bruit a été quasi inexistant, Koran ferme les yeux une seconde, ça faisait des années qu'il n'avait pas tué quelqu'un et la sensation est toujours aussi particulière. Au delà du désagréable, elle le répugne mais il s'efforce de ne pas y penser, sinon il pourrait ne pas le supporter.

Il récupère le fusil à ses pieds et passe la sangle au dessus de sa tête. D'autres poursuivant s'approchent, il avance toujours accroupi, jusqu'au prochain dos à lui. Il se lève et le plaque au sol aussi tôt serrant son bras autour de son cou jusqu'à ce qu'il s'évanouisse. Des murmures s'élèvent d'avantage, ils s'appellent mais pas de réponse, ils comprennent que quelque chose cloche. Koran s'allonge alors complètement dans la terre et tire le corps du mercenaire sur lui. Tout doucement quelqu'un s'approche, il appelle le quatrième des mercenaires plus loin et retourne le corps mais Koran lui pointe son arme entre les deux yeux et tire sans hésitation. Le dernier se met à tirer à l'aveugle et touche sur les deux corps de ses comparses, Koran glisse sur le sol plus loin et se redresse soudainement pour abattre le dernier de ses poursuivants.

Il ne reste plus que le bruit des animaux et le village qui s'agitent après avoir entendu les coups de feu. Koran se retourne vers les lumières qui s'approchent, des torches et des hommes qui continuent de marmonner le nom du tigre. Ils préfèrent mettre le feu à la forêt et faire fuir le prédateur. Il n'y a pas de temps à perdre, il doit fuir le plus loin possible avant d'être pris dans le brasier, quitte à croiser le véritable fauve dans la jungle sombre.

Ses instincts de survie reviennent aussi tôt, les souvenirs d'une mise à l'épreuve ressurgissent, des souvenirs d'avant son entrée à Interpol : des souvenirs des forces spéciales britannique. Un léger sourire ironique apparaît sur son visage quand il repense à la raison qui l'a fait quitter les forces spéciales ; pour une vie un peu plus tranquille au sein d'un organisme peu souvent sur le terrain. Sa chance légendaire a fini par le rattraper.

Pour la nuit il devra essayer de se mettre à l'abri dans les hauteurs des arbres, au risque de croiser des serpents, leurs grandes feuilles lui permettront au moins de se cacher du regard des hommes qui sont encore à sa recherche. Une nuit blanche en perspective pour mieux pouvoir quitter le pays à l'aube. Il devra regagner dès que possible Numea, la dernière adresse connue de Javier Fonseca, un millionnaire espagnol. Il gérait une de ses filiales depuis l'île et correspondait avec le Baron, peu de temps après la prise en charge de Neven par le gouvernement anglais. Coïncidence, Javier était aussi l'un des clients privilégier de Casey Howkins. Certainement qu'il doit pouvoir l'aider à remonter la trace du Baron, d'une manière ou d'une autre. La seule question qui continue de lui tarauder l'esprit, sans compter celle sur la réelle identité du Baron, est de savoir si même en connaissant son nom, que pourra-t-il faire contre lui ? Il n'a qu'un surnom sur un bout de papier, que des témoins qui ne voudront jamais prêter serment, ni même le poser par écrit. Des preuves inefficaces pour le moment et Neven doit en avoir conscience, alors pour un assassin professionnel comme lui, la justice impuissante est elle suffisante ? Certes, pour le moment c'est prématuré, mais il ne peut s'empêcher d'y penser dès que le calme revient et que son esprit a le temps de divaguer. En haut de son arbre, le regard plongé dans le ciel noir de la nuit, il n'arrive pas à s'enlever cette interrogation de l'esprit. Sans doute parce qu'il croit fermement en cette justice, même si elle n'est pas infaillible, il veut continuer d'y croire car sinon tout ce qu'il aura fait jusqu'à maintenant n'aura servi à rien. Tout son combat ne rimerait à rien.

Alors reste encore une question : que fera-t-il si Neven choisit de ne plus y croire ?

 

De sa prison, Neven a d'autres préoccupations. Il fait maintenant nuit et contrairement à ce que l'on pourrait croire, toute l'aile est plus silencieuse qu'une église. Allongé sur sa couchette, il a les yeux grand ouvert, les bras croisés derrière la tête. La justice, la peur, le doute, la mort, les rêves, l'amour, la rédemption, il a cessé d'y croire depuis longtemps sans savoir exactement depuis quand. Serait-ce à la suite de l'entraînement militaire qu'il a subit pendant des années ? Ou plutôt depuis qu'il a été vendu par ses parents ? Ou serait ce encore plus ancien ? Remontant le passé d'avantage, avant l'âge de raison, avant la naissance du plus jeune de ses frères, avant les premiers mots de Milos, cette époque où il suivait partout son père croyant encore qu'il aimait ses enfants. Le souvenir d'un début de printemps, d'un lac gelé, de l'eau glacée qui poignardait son jeune corps de part en part et du regard indifférent de son père. Resté au bord, sans bouger, sans une grimace alors que l'eau s'insinuait dans ses poumons. Puis la main courageuse de Dejan.

De l'incompréhension et de la haine qui n'a fait que s'agrandir dans son cœur, comme un poison qui se repend lentement. Et à chaque événement, à chaque scène toujours plus violente et douloureuse, ce poison est devenu plus fort pour finir par tout détruire. Ce qu'il reste aujourd'hui de Neven, ni Sima, ni même Milos ne peut l'imaginer.

La justice. C'est une plaisanterie ? Il a sa propre idée de la justice et il n'est pas prêt d'y renoncer. Tout ce qu'il a à faire c'est attendre mais certainement pas les bras croisés. Neven arque un petit sourire en coin en se ressassant une rencontre opportune, un peu plus tôt dans la journée.

 

- Je dois avoir un sacré pèt' au casque pour voir des fantômes si tôt dans la journée..., lui avait dit le détenu qui finissait son repas.

- Tout dépend de qui tu parles.

- Au dernières nouvelles tu croupissais à Londres...T'es venu voir un vieux copain ?

- Tu m'as manqué que veux tu.

- Me fais pas perdre mon temps sale Yougo'. Qu'est-ce que tu veux ?

 

Neven avait arqué un nouveau sourire victorieux, il s'installait en face du détenu qui était seul jusqu'à maintenant et venait piocher allégrement dans son assiette. Un comportement dangereux qui avait fait monter la tension d'un cran mais Neven n'en avait rien montré. Le vieux n'était pas loin des cent kilos, il pourrait aisément lui briser les os mais il n'en avait rien fait car même s'il avait pris de l'âge, il était loin d'être fou.

 

- Je cherche le Pendu.

Le vieux avait était devenu plus sérieux. Neven l'avait dit si naturellement, une petite poignée d'homme dans le monde savait de qui il parlait et Jacob Parish le savait. Inutile de chercher à savoir comment Neven savait que Parish était au courant, la réponse était trop évidente, donc inutile de le nier valait mieux être honnête avec quelqu'un comme Neven.

- Tout ce que je sais c'est qu'il n'est pas dans l'aile principale.

- Je suis sûr que tu en sais un peu plus..., avait insisté Neven.

La peur. Un regard implacable, aussi glacial que déroutant.

- Je sais pas dans quelle aile il se trouve mais les détenus qui doivent être protégés ne sont jamais, je dis bien JAMAIS mis avec les autres détenus. Que ça soit pendant les heures de repas, les sorties dans la cour, les travaux ou encore les douches. Jamais on ne les voit.

- Tu dois bien avoir une idée. Après toutes ces années à moisir ici.

- Rien. Et pour être honnête j'en ai rien à foutre. Je fais mon temps.

- Pas sûr que tu y survives.

- C'est une menace ? Avait haussé la voix le vieux Parish.

- Ce n'est pas mon genre tu sais bien. S'était tout de suite disculpé Neven en levant les mains en l'air toujours avec le sourire. Je préfère l'action aux paroles...

 

Neven s'était levé de sa chaise emportant avec lui le petit morceau de pain qui restait sur le plateau, il avait rejoint à nouveau Michael qui avait terminé et qui s'était dirigé dès lors vers la cour. Le serbe n'avait donc plus qu'une chose à découvrir, c'était comment atteindre le Pendu, la seule véritable raison de sa présence, Michael ce n'était que du boulot en plus.

 

Comme Sima, Neven ne dort plus depuis des années. La cause n'est pas liée directement à son traumatisme d'enfant mais plutôt à l'entraînement drastique qu'il a subi. Au réveil des prisonniers, c'est donc avec un tout nouveau plan qu'il rejoint les douches. Il sent les regard sur lui, les murmures sur son passage, certains doivent le reconnaître, d'autres n'ont entendus que des rumeurs mais la plupart ignore réellement qui il est. Seuls certains détenus de l'envergure de Parish connaissent les véritables raisons de son incarcération et ils se comptent sur les doigts d'une main. Le mystère qui plane sur son identité lui donne un réel avantage, mêlé à son assurance naturelle, il dégage immédiatement un grand pouvoir de dissuasion. Personne de censé ne s'en prendra à lui et il est bien connu que les prisons sont peuplées de personnes censées.

 

- Hé la nouvelle, tu voudrai pas venir t’asseoir sur mes genoux ?

 

Un mètre quatre quinze, entre cent dix et cent vingt kilos. Les bras trop musclés pour réussir à les croiser et des tatouages nazis ne laissant pas de place aux doutes quant à ses principes de vie. Assit sur un banc près des douches avec seulement une serviette autour de la taille, ses amis de la communauté rient aussi tôt à ses provocations. Neven les analyse les uns après les autres sans rien répondre.

 

- J'ai un petit cadeau de bienvenue pour toi, sourit l'homme en écartant sa serviette dévoilant son sexe en érection.

Nouvel éclat de rire, Neven se met à rire à son tour.

- Désolé, jamais avant mon café.

 

Neven retire sa propre serviette et s'en va nu jusqu'à sa tenue restée plus loin, il se tourne vers le bande de nazis resté incrédule une fois habillé.

- Au fait si jamais tu essaies encore de m'offrir un cadeau de bienvenu, je t'enfonce une cuillère en plastique par l'urètre. Et si ça te suffit pas, saches que j'ai beaucoup d'imagination.

 

Le chef de la meute fronce alors les sourcils, il se lève furieux, menaçant mais il n'avance pas pour autant. Neven reste immobile sans défaillir, son sourire devient plus sadique.

- Vas y, donnes moi ce plaisir. Il lui murmure.

 

C'est un gardien qui vient interrompre la joute visuelle, le grand nazi se rassoit faisant un signe de tête au gardien qui surveille la porte. Neven croise également son regard quelque part un peu déçu. Il quitte les douches et se dirige vers la cafeteria où doit déjà être Michael. Certainement comme à son habitude, il prend son petit déjeuner seul, son gobelet de café à la main tenant un livre de l'autre, il reste imperturbable malgré le début d'une bagarre à l'autre bout de la salle. Il est bien plus fort qu'il ne l'aurait cru même si les véritables blessures sont loin d'être visibles. La prison l'aura à l'usure, sans qu'il ne s'en rende compte et il ne pourra pas l'éviter même avec toute l'aide du monde. Tout ce qu'il peut faire c'est survivre.

Pour la deuxième fois, Neven s'assoit simplement en face de lui, cette fois aucune remarque de la part du blond qui continue de lire son livre. Ils boivent leurs cafés en silence ce qui leur convient à tous les deux. C'est le blond qui le rompt en premier en terminant son café.

 

- Tu es là pour m'aider si je comprends bien ?

- Pour te protéger.

- Me protéger ? Pour un an uniquement ? C'est stupide.

- Un an suffira amplement à imposer une distance entre toi et les autres. Ils ne s'approcheront plus de toi ensuite.

- Tu es aussi expert en prison.

- Si on veut. Mais tu as l'air de bien t'en sortir sans moi. Lui dit Neven en regardant ses cicatrices.

Michael suit son regard.

- Un cadeau de bienvenu.

- Oh toi aussi ? Ils sont vraiment sympa dans cette prison avec les nouveaux.

- C'est toi l'expert.

- Dis moi maintenant, lequel d'entre eux t'as fait ça ?

 

A cet instant précis Michael compris comme tous les autres que Neven n'était pas  homme à chercher plus qu'il n'en faut et que son passé était d'autant plus sombre que celui de ses frères. Le fossé entre les deux frères s'étaient agrandi : ils ne se ressemblaient définitivement en rien. Milos sait il à quel point son aîné est différent de son souvenir ? Derrière ses sourires, son humour noir, se cache un trou béant où jadis son cœur battait. Un homme froid et sans aucune réelle émotion. Un homme dangereux.

 

 

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