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A l'ombre du feu 2 - Rainlight {Chapitre 10}

Publié le par danouch

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Thème musical (en boucle) : ici

 

Chapitre 10

L'âme sœur

 

 

Cette fois l'hôtel choisi est des plus discret. Pas de petit déjeuner compris dans la formule, un petit immeuble semblable à tous les autres du quartier. Briques rouges, portes vertes, presque aussi mornes que le ciel gris et constant de Londres. Sima ouvre les rideaux en espérant y faire entrer un peu de lumière mais c'est peine perdue. Allongée sur le lit, la petite Stella a le sommeil lourd, les poings serrés, le visage apaisé, elle reste immobile, le corps légèrement soulevé par ses respirations régulières. Pour rien au monde son père adoptif ne voudrait la réveiller, elle a tant d'heures à rattraper. C'est la première fois de son existence qu'elle peut dormir aussi sereinement.

De son côté, cela fait des années qu'il ne dort plus, son corps a fini par prendre l'habitude et son insomnie n'est plus aussi douloureuse. Il lui arrive de dormir debout au milieu de la journée, de profiter de dix minutes de tranquillité pour fermer les yeux et s'assoupir instantanément. Mais il ouvre également les yeux au moindre bruit, au moindre geste trop brusque et trop proche. Depuis qu'il s'est enfui avec elle, c'est encore pire. Ses tremblements, la peur d'être retrouvé n'a jamais été aussi forte. Quand pourra-t-il enfin y croire ? Comme Milos ?

A bien y réfléchir, il n'est pas certain que Milos y croit d'avantage. Bien au contraire. Alors que Sima est certain d'avoir fait le premier pas pour tourner la page, Milos paraît être toujours aussi enchaîné. C'est à peine s'il s'en rend compte, au travers ses gestes et ses mots, comme lorsqu'il lui a raconté sa rencontre avec Andreï. Sima repense à cet homme dont Milos a peine prononcé le nom et qui pourtant a donné un autre sens à son récit. Michael von Ham. La rencontre avec Andreï cachait plus que des retrouvailles.

Déambulant dans le chambre d'hôtel, Sima s'approche de la salle de bain pour refaire sa natte, il s'observe quelques secondes se faisant la réflexion qu'il est portrait craché de son père. La même fatigue ce lit sur son visage mais il semble que sa peau soit un peu plus colorée. Il baisse légèrement la tête, un voile de tristesse devant les yeux puis il reprend son souffle et tente d'oublier ses pensées noirs en revenant dans la pièce principale. Il s'étire longuement avant de s'asseoir sur le petit fauteuil au coin de la pièce, les jambes croisées, le regard protecteur sur l'enfant puis un autre sur la silhouette de son petit frère, couché sur un lit de camp plus loin.

 

Quelques heures plus tard, Milos ouvre les yeux à son tour, réveillé par le bruit du vibreur de son portable sur la moquette. Machinalement il saisit l'appareil et le colle à son oreille, la bouche pâteuse.

- Oui ?

- Comment vas tu Milos ?

- Shiva ? A moitié endormi, il se redresse tout en se frottant les yeux. Que me vaut l'honneur ?

- Une amie n'a pas le droit de t'appeler ?

- Une amie ?

- Quoi d'autres ? Ne fais pas comme si ce n'était pas le cas s'il te plaît. Maintenant que Michael est derrière les barreaux, il n'y plus que de l'amitié entre nous.

- Il n'a pas encore été condamné.

- Tu en doutes ? Il a tout avoué, que veux tu qu'il se passe d'autre ?

Milos ne trouve à rien à répondre. Il sait pertinemment que Shiva a raison.

- Pourquoi appelles tu ? Reprend Milos de mauvaise humeur.

- Parce que je m'inquiète pour toi. Parce que je sais que c'est dur mais tu ne l'avoueras jamais, comme tu n'as jamais avoué ce soir là que tu l'aimais...

- Je te remercie mais je vais bien. Je rends visite à de la famille, je t'appellerai quand je serai rentré.

- Tu sais que tu peux compter sur moi, n'est ce pas ?

- Non Shiva. Tu as beau dire ce que tu veux, espérer ce que tu veux, nous ne serons jamais des amis. Tu es Shiva Dash et je suis Milos Roarke, nos mondes sont différents. Au revoir Shiva.

 

Milos raccroche sans attendre une réponse. Il frotte une énième fois les yeux. Énervé à l'idée que sa première pensée de la journée soit encore pour lui, que son monde semble tourné littéralement autour de lui ! Quand arrivera-t-il à s'en défaire ? Quand est-ce qu'il finira par oublier ? Est-ce que c'est possible ? Mais en a-t-il envie ? A nouveau les images de la veille lui revient à l'esprit. Ce sentiment d'abandon si fort qui lui a déchiré la poitrine.

 

- Va le voir.

Milos relève les yeux. Sima est resté assit sur son fauteuil, un sourire tendre sur les lèvres.

- Pardon ?

- Va le voir. Tu pourras jamais tourner la page si tu n'y vais pas.

Milos cligne plusieurs fois des yeux.

- Comment ?

- C'est évident. Pas besoin d'être ton frère pour s'en rendre compte. Hier, tu l'as quasiment avoué de toi-même.

- Je....Tu ne connais pas toute l'histoire...

- Pas besoin.

- Au contraire. Tu ne sais pas Sima alors s'il te plaît n'essaie pas de me donner des conseils.

- Oncle Milos ? Ca va pas ? Marmonne l'enfant qui ouvre doucement les yeux.

 

Les deux hommes se sont d'un même élan retournés vers Stella. Elle s'étire, regardant le dos courbé de son oncle comme s'il portait toute la misère du monde sur ses épaules, son père vient aussi tôt s'asseoir près d'elle.

- T'en fais pas, tout va bien. On discutait simplement.

- De quoi ?

- On va bientôt partir. Répond Sima en regardant son frère

- Où ça ?

- Aux États Unis. On va dans notre maison.

- Une maison ? Une vraie ? Comme dans les histoires de maman ?

 

Le regard de Stella s'illumine soudainement, plein d'espoir et d'étoiles dans les yeux, Sima lui affirme d'un signe de tête puis il l'aide à se lever. Il partage un regard complice avec son frère qui est partagé entre la joie de savoir que Sima et la petite vont venir vivre avec lui et la peur à l'idée d'avoir à reparler de Michael

 

* * *

 

- Je le vois cet après-midi.

- Ne prenez pas de risque. Les charges contre lui ne sont pas assez lourdes pour pouvoir le garder derrière les barreaux, il a les meilleurs avocats de son côté, on ne peut pas se permettre de foutre en l'air cette enquête.

- Je le sais.

- Ce n'est qu'une prise de contacte, jouez son jeu.

- Je vous recontacte rapidement.

 

Koran raccroche. Il reste pensif quelques secondes puis il récupère sa veste et son arme qu'il range dans sa veste, il se dirige jusqu'à la chambre de l'autre côté du couloir. En s'approchant il entend les rires cristallins de la petite Stella, il frappe trois fois puis après un instant une quatrième fois et rentre directement à l'intérieur. Sima est le premier à le voir s'avancer, il le salue par un petit sourire quand leurs regards se posent sur les deux autres qui s'amusent devant la télévision.

Bien plus joyeux que la veille, Milos affiche un immense sourire radieux, comme débarrassé de ses démons au simple contact de l'insouciance de Stella.

 

- Nous allons partir. Lui annonce Sima.

- Pardon ? Lui répond aussitôt Koran.

- Nous rentrons avec Milos. Nous n'aurons plus besoin de votre protection, ni de celle d'Interpol.

Koran jette un œil vers Milos qui continue de rire avec l'enfant.

- Interpol ne pourra plus vous protéger là bas de toute façon. Je vais prévenir le FBI, pour qu'ils prennent la relève.

- Je ne crois pas que ça sera nécessaire...

Koran laisse échapper un petit rire ironique.

- Je sais que vous voulez tourner la page mais pour changer de vie il faut du temps.

- Ils n'iront pas jusque là bas, ils m'ont déjà oublié. Un morceau de viande parmi tant d'autres...

- Je vous laisse pas le choix Sima. Vous savez déjà quand ?

- Après demain. L'interrompt Milos qui s'est rapproché des deux hommes. J'ai encore deux ou trois choses à régler.

 

Koran l'observe un instant silencieux, Sima n'était visiblement pas au courant mais il acquiesce sans contredire son frère. Stella trop loin pour les entendre, chantonne un générique de dessins animés.

 

- Des choses à propos de Neven ?

- Entre autres. Milos hausse les épaules préférant rester vague.

 

L'agent n'est pas dupe, il arque un petit sourire en coin et durant une longue minute il partage un regard plein de non dits avec le brun. Les adieux sont proches et les deux hommes comprennent rapidement qu'ils ne sont pas prêt de se retrouver. Peut-être est-ce la dernière fois ? Ca en a l'odeur en tout cas. Au fond, ils n'ont jamais pensé le contraire, malgré ce qu'ils ont pu ressentir, ce qu'ils ont pu partager sans s'en rendre compte et en si peu de temps, jamais ils ne se sont bercés d'illusions. C'est ce qui rend les choses plus facile, ce qui les empêche d'être triste. Au lieu de ça c'est une sorte de nostalgie qui les domine, l'impression d'avoir rencontré quelqu'un d'extraordinaire, quelqu'un qu'ils ne pourront jamais oublier.

 

- Je dois m'absenter cet après-midi mais on doit fêter ça ce soir. Sourit Koran.

- Fêter notre nouveau départ ? Ca sonne bien. Sourit Sima.

- A tout à l'heure alors. Lui dit Milos sans avoir détacher ses yeux de lui.

 

Koran les salue rapidement puis il sort de la chambre, un poids étrange sur la poitrine mais rapidement il s'oblige à l'oublier. Il arrive à l'extérieur en moins de cinq minutes, le regard ferme et déterminé, il boutonne le dernier bouton de son menton et marche rapidement jusqu'à sa voiture garée plus loin.

A quelques mètres de là, on l'observe discrètement traversé la route, encore caché derrière l'ombre d'une capuche, aspirant un soda à travers une paille. Si Koran s'était tourné une seconde, il aurait pu apercevoir le regard acier de l'homme qui maintenant fixe l'une des fenêtres de l'immeuble. Une seconde plus tard, il jette son gobelet.

 

A l'étage, Stella a le front collé à la fenêtre pendant que Sima se laisse glisser sur le lit, les mains croisés sur le bas du torse. Milos vient s'asseoir à ses côtés attendant patiemment qu'il sorte de ses pensées.

- Tu as vraiment encore des choses à faire ici ? Lui demande Sima intrigué.

- Rien de bien particulier. Je vais voir un avocat que je connais pour Neven, qu'il ait au moins quelqu'un de compétent sur son dossier et puis une connaissance avec qui je dois m'entretenir.

- Tu m'impressionnes, lui avoue Sima.

- Ne dis pas n'importe quoi.

- Orange...murmure Stella.

Les deux frères se tournent vers l'enfant qui n'a pas bougé de la fenêtre, les mains de chaque côté du visage.

- Tu as dis quelque chose ? Lui demande Sima.

- En bas. Dit elle en fixant le trottoir. Un monsieur orange...

 

Sima se lève du lit, il s'approche de la fenêtre à son tour.

- Qu'est-ce qui ne va pas ?

- Là, dit la fille en plaquant son doigt sur la vitre. Le monsieur il avait des cheveux orange.

- Comme ta maman tu veux dire ?

- Oui mais il était là hier aussi.

- Quoi ?

 

Milos se lève brusquement, il se précipite à la fenêtre cherchant rapidement l'homme que lui désigne la petite mais ce dernier porte une capuche et à cette hauteur on ne voit pas son visage.

 

- Tout à l'heure il avait enlevé sa capuche et il avait des cheveux orange !

Milos recule, il s'avance jusqu'à la porte d'entrée rapidement rattrapé par son frère.

- Tu descends ? S'étonne Sima. C'est peut être pas une bonne idée...Dit il d'une voix faible.

A nouveau la peur sur son visage, les tremblements et la sensation de plus être en sécurité.

- Je me dépêche. Le rassure Milos.

 

Il prend l'ascenseur pour arriver dans le hall, un petit tour d'horizon avant de rejoindre l'entrée. Le vent froid de l'extérieur lui rappelle qu'il n'a pas pris de veste et lui balaie les cheveux au passage rendant l'espace d'une seconde la rue moins visible.

Il trouve l'homme à la capuche au même endroit et il le regard fixer sur lui. Milos n'hésite pas longtemps avant de traverser et de s'approcher. Il s'attendait à le voir partir mais au lieu de ça, il se redresse et découvre sans hésiter son visage.

 

- Lysandre. Souffle Milos surpris et rassuré à la fois.

- Salut. Lui répond simplement le plus jeune.

 

A l'intérieur du bâtiment, Sima ne peut détacher son regard de son frère, il a le cœur qui bat à vive allure. Il déglutit en voyant l'homme dévoiler son visage.

- Tu vois papa, ils sont encore plus orange que maman !

Sima ne répond rien, incapable d'ouvrir la bouche.

 

- Qu'est-ce que tu fais ici ? Demande Milos à Lysandre perplexe de le retrouver si loin de leur pays.

- Je vérifiais quelque chose.

- Tu vérifie? Milos finit par comprendre. Il n'est pas là...Tu t'en rends bien compte.

Lysandre hausse les épaules. La fatigue sur le visage, les yeux cernés et la peau plus terne que jamais.

- Vous étiez ma seule piste.

- Écoutes, tu devrais arrêter. Si Andreï a décidé de disparaître tu ne le retrouvera pas.

- Alors pourquoi Casey Howkins est aussi à Londres ?

Milos est surpris de voir qu'il est également au courant. Sa détermination est aussi admirable qu'elle est effrayante.

- Je ne sais pas...Mais Andreï n'est pas assez stupide pour se cacher dans une ville comme Londres. Casey a bien trop d'amis ici pour être en sécurité...

- Alors où ? S'exclame brusquement Lysandre une leur d'espoir dans les yeux. Vous le savez, n'est-ce pas ?

- Non..., murmure Milos, je suis désolé, je ne sais pas...

- Vous mentez..., cingle Lysandre furieux.

Les cheveux comme ébouriffés, Lysandre s'approche de Milos pour mieux planter ses yeux dans les siens. D'instinct il recule son visage.

- Vous devez me le dire. Andreï se sacrifie pour moi et je ne peux pas vivre avec l'idée de ne plus jamais le voir !

- Je suis désolé...

- ARRETEZ DE REPETER CA ! Dites moi ce que vous savez !

- Je te jure que je ne sais rien ! S'écrie à son tour Milos. Si je savais je le sortirai de là ! Je te signale qu'il s'agit de mon frère. Il m'importe autant qu'à toi !

- Alors pourquoi est-ce que vous restez ici à ne rien faire ? Pourquoi est-ce que vous ne partez pas à sa recherche ? Au lieu de ça vous allez dans des ruines au fin fond du trou du cul de l'Europe ! Vous vous prélassez dans des hôtels ! Quel genre de frère êtes vous ?!

- Je te préviens Lysandre. Tu as intérêt de ne plus l'ouvrir à partir de maintenant. Tu ne me connais pas. Et tu ne connais pas Andreï alors fermes la et rentres chez toi ! Vas étudier ! C'est pour ça qu'il est parti espèce de gamin égoïste !

- Je l'aime. Lui réplique fermement Lysandre sans détourner les yeux. Et ça vous ne pouvez pas le comprendre. Je n'ai pas besoin de vous de toute façon. Même si je suis seul, je finirai par le trouver.

 

Lysandre remet sa capuche et lui tourne le dos, les mains bien enfoncées dans ses poches, il se mêle à la foule sans difficulté jusqu'à complètement disparaître, laissant Milos seul sur le trottoir, étrangement chamboulé. Les mots de Lysandre continuent de faire échos dans son esprit l'immobilisant plusieurs minutes dans la même position. Un flots d'images, de phrases, de voix.

 

«  Tu es libre. »

 

Milos tressailli un instant, il revient à l'intérieur de l'hôtel essayant de mettre de l'ordre dans ses idées, d'oublier cette scène, d'oublier ce qu'il a dit et toute la fureur de ses sentiments qui jaillissait de ses prunelles d'argent.

Dans la cage d'ascenseur, son corps s'appuie brusquement contre la paroi métallique. Ce n'est pas possible d'être dans un tel état, pour si peu de choses, d'avoir encore et toujours l'esprit pourri par son visage de démon blond ! Milos plaque ses mains autour de sa tête, comme s'il espérait faire fuir ces images. C'est un enfer. Sima doit avoir raison, il ne pourra pas avancer s'il ne se décide pas à l'affronter.

 

***

 

Un mois avant le départ...

 

Casey était devenu fou. Ca ne pouvait pas être autre chose. Il était complètement fou et personne ne pouvait rien contre cette folie. Même Michael, lui dont on disait qu'il était son rival, se pliait à ses ordre comme n'importe lequel de ces damnés.

 

- Ne faites pas ça...Je vous en supplie, murmurait Milos dans le bureau de Michael complètement ahuri.

- Je n'ai pas le choix.

- Bien sûr que si ! Ne l'obligez pas à...

- J'aimerai bien Milos mais je n'ai pas le choix ! Insiste Michael

 

Milos allait s'écrouler, Michael restait imperturbable, dos à lui, alors qu'il était à deux doigts de tout envoyer valser. Le cœur battant, une voix hurlant à la mort au fond de son esprit.

 

- Casey l'exige.

- Et alors ! Depuis quand est-ce que vous l'écoutez ? Depuis quand est-ce que vous courber l'échine devant Casey Howkins ? S'écria Milos.

 

Lui qui ne perdait jamais face, d'un calme à tout épreuve. Le masque s'effondrait et la douleur était encore plus visible mais Michael restait encore et toujours dos à lui, debout, les mains posées sur son bureau.

 

- Tu ne comprends rien..., Disait il la tête penchée en avant.

- Ce que je comprends c'est que vous n'êtes qu'un lâche...Un hypocrite. Un putain d'hypocrite, pas même l'ombre de son père ! TU ES PIRE QU'UN CHIEN !

Michael se retourna brusquement mais ça n'impressionnait pas Milos qui gardait les poings serrés. Le grand blond en faisait pourtant trembler plus d'un d'un simple regard. Il franchît les pas qui le séparaient du brun, le visage à hauteur du sien sans baisser une seconde les yeux.

- Rentres chez toi Milos. Va t'en avant de le regretter. Il lui ordonna avant de se retourner rapidement jusqu'à son fauteuil.

 

Milos relâcha la pression qui l'espace d'un instant s'était logée sur ses épaules mais en même temps il se laissa à nouveau submerger par le désespoir, sans trouver de réponse.

 

- Laisses le partir, je t'en supplie..., Milos recommença à le tutoyer.

Michael lâcha un profond soupire.

- Putain mais que veux tu que je fasse pour que tu acceptes !? S'écrie Milos. Qu'est-ce que je dois faire pour que tu le relâches !?

- Tu ne peux rien faire...Tu n'imagines pas de quoi il est capable. Casey Howkins ne s'en prendra pas seulement à moi. Il s'en prendra à tout ce qui compte pour moi puis seulement après il me détruira...Comme il a détruit mon père.

- Qu'est-ce que tu sous entends ?

- Rien du tout, soupire Michael...Je t'ai déjà dit de partir Milos.

 

Michael tourna son fauteuil à nouveau dos à Milos. Il passa sa main sur son visage puis dans ses cheveux, fatigué et agacé par la discussion mais Milos ne pouvait pas abandonner. Il desserra ses poings puis s'avança à son tour jusqu'au fauteuil, il se figea devant Michael qui avait fermé les yeux, la tête penchée en arrière. Lentement il ouvrit une paupière puis l'autre, dévoilant ses pupilles ambrées par les rayons du soleil.

 

- Laisses moi le faire à sa place. Tu n'aurai pas besoin de l'expliquer à Casey, s'il vient à l'apprendre tu diras simplement que tu ne savais, que je l'ai fais de ma propre initiative.

Michael resta silencieux une seconde.

- Ne sois pas stupide...Je ne ferai pas ça.

- Pourquoi ?

- Parce que je ne veux pas.

Milos fronce les sourcils à nouveau prêt à exploser.

- Ne joues pas les enfant pourri gâté. Ca ne change pas pour moi, tant que c'est pour le travail.

 

Michael se senti insulter puisqu'il sembla brusquement outré. Milos recula et parti d'un pas décidé jusqu'à la porte, ne voulant pas lui laisser le plaisir de lui répondre. Mais il était rapide le bougre, Milos se senti tiré en arrière par une poigne forte. Michael était furieux, sa main était si fermement agrippée à son bras que la poigne devenait douloureuse. Milos voulut se dégager mais brusquement on lui jeta un liasse de billet dans les mains.

 

- Fais le avec moi alors. Maintenant que je viens de te payer, c'est pour le travail. Cracha Michael

 

Milos mit quelques secondes avant de refaire surface. Il fixa les billets dans sa main, le visage de son vis à vis déchiré par la colère et sa fausse insensibilité si malsaine. Quelque chose se brisa à cet instant. Peut être son estime, les reste de sa fierté, mais encore plus, les derniers sentiments d'amour qu'il gardait prisonnier dans son cœur. La liasse de billet dans les mains, il savait que ce geste était le pur fruit de sa frustration et de son orgueil piétiné par les mots de Milos mais ils étaient irréversibles. Michael le savait, il l'avait fait délibérément, comme pour lui crier que Milos avait gagné, que tout était terminé et qu'il avait enfin eu ce qu'il voulait. Réussir à transformer tout ce qu'il avait de beau entre eux en un sentiment d'amertume si profond qu'ils ne pourront jamais l'oublier.

 

- Alors. Tu ne veux plus libérer ton frère ? Accepte le et je le libère.

 

Accepte de mettre un terme à nous et tu pourra t'enfuir avec lui. C'est Andreï ou Moi.

 

Ses doigts se resserrèrent sur les billets verts, soudainement il se jeta sur les lèvres de Michael le faisant reculer jusqu'à s'accrocher au bord de son bureau. Celui là qui des années auparavant avait été la scène de leur premier baiser. Là où tout avait commencé. Là où tout allait se finir.

 

Mais ça n'allait pas être doux, ni tendre, pas d'adieu pur et mélodieux. Milos comptait exorcisé toute sa haine, sa rancune, il saisit les cheveux blonds, le tirant en arrière pour lui mordre le cou jusqu'au sang, agrippant sa jambe qu'il remonta sur sa hanche pressant son bassin contre le sien. Michael sifflait de douleur ne pouvant s'empêcher de gémir sous la langue humide et obscène du brun. La sensation de son torse finement musclé contre le sien et ses mains qui le griffaient de toute part, sa tête se noyait dans le mélange de sentiments incontrôlables. Violemment Milos déchira sa chemise lui arrachant un nouveau gémissement de douleur alors que déjà la longue trace d'une griffure rouge sang traversait sa poitrine.

Milos n'entendait aucune de ses protestations, il lui arracha un nouveau baiser vorace, plus bestiale que sensuel le forçant à s'allonger complètement sur bois. Il descendit les manches de la chemise violentée, dévoilant ses épaules et emprisonnant ses bras dans son dos. Son torse nu offert à sa vie, soulever par des respirations courtes et saccadées. Sa peau luisait et chacune de ses courbes saillait sous la lumière. D'une main experte il défaisait la boucle de la ceinture et déboutonna le pantalon sans lâcher les lèvres du blond qu'il maltraitait sans relâche de suçons, morsures, caresses. Sa main plongea maintenant sous le tissu du sous-vêtement, s'emparant de son sexe sans aucune délicatesse, lui arrachant un nouveau râle partagé entre la douleur et le plaisir intense. Ses doigts étaient froid mais le corps de Michael était en effervescence et alors que Milos relâcha enfin sa bouche, Michael prêta enfin attention à son visage. Le blond remarqua que Milos avait le souffle saccadé, le front en sueur et une érection plus pressante que jamais. Michael essaya de bouger ses bras mais Milos l'en empêcha et le plaqua à nouveau contre le bois maintenant sa main contre son torse pendant que l'autre accélérait.

Le dos du millionnaire s'arquait d'avantage, n'entendant pas le bruit que fit la braguette du brun. Soudainement Milos retira le sous-vêtement gênant, Michael vit alors qu'il avait déjà baissé son propre pantalon, essoufflé il remonta ses yeux sur l’émeraude humide de Milos qui remonta sa main jusqu'à sa bouche avalant goulûment son doigts, l'enroulant et déroulant de cette langue perverse et gluante. Michael en restait subjugué, incapable de faire le moindre mouvement, hypnotisé par cette langue qui semblait se délecter à parcourir son majeur jusqu'à la pointe de son ongle. Milos s'approcha vivement de son visage relâchant son doigts, le regard glacial et électrisant, la langue toujours tirée cherchant une compagne que Michael ne tarda pas à lui donner et qu'il mordit aussi tôt alors que le majeur lubrifié l'avait pénétré. Il ne pu s'empêcher de crier, ce qui avait certainement effrayé les autres employés, Milos dont les lèvres se rougissaient de sang le fît taire en l'embrassant avec avec encore plus de force. Dévorer jusqu'au plus profond de sa gorge, pénétré de part en part, il se cambrait sous les premiers mouvements tandis que le sang se mêlait à leur échange sauvage.

Au bout de quelques minutes, Michael s'était habitué mais il n'eut pas le temps de quémander d'avantage, Milos était déjà en lui. Prévoyant un nouveau cri, il lui couvrait la bouche de sa main puis alors qu'il s'était calmé, il lui caressait les lèvres avec son index qu'il finit par introduire dans sa bouche, Michael ne tarda pas à le lécher avec autant de ferveur que le plus jeune un peu plus tôt sous les vas et viens de plus en plus bruyants. Les vas et viens devenaient toujours plus violent, sans un seul moment de répit. Saccagés, déboussolés, il n'y avait que les voix, les râles, la chaleur insupportable et poisseuse qui collait à leur chair à vif. Les derniers coups de reins rapides et puissants qui exultaient leur plaisir jusqu'au dernier cri libérateur. L'explosion des dernières émotions. Les dernières forces, le corps tendu au maximum, les dents serrés et le relâchement brutal.

 

Alors que son corps endolori se retenait par la simple force de ses bras tendus, Milos recouvrait lentement la vue, essayant de retrouver son souffle. Juste en dessous de lui, le torse de Michael se soulevait difficilement, la bouche grande ouverte cherchant le peu d'oxygène encore présent autour d'eux. Le torse lacéré par ses ongles, les bras derrière son dos, piégés par sa chemise dont les boutons étaient éparpillés partout dans la pièce et sur le bureau. Lentement Milos se retira, Michael ne réagit pas, toujours à bout de souffle, les yeux fermés. La scène était choquante. Milos senti ses jambes céder sous son poids mais il se rattrapa rapidement à l'une des chaises. Il recula lentement, puis il se rhabilla rapidement. Michael se releva enfin. Assit sur le bord du bureau maintenant, la tête penchée en avant, sa respiration était plus régulière. Il redressa enfin son visage, croisant le regard de Milos qui n'osa pas détourner les yeux.

Pas un mot. Ils se souvenaient tous les deux de toutes ces fois où ils avaient fait l'amour, du sentiment si exaltant qui les animait à la fin, qui gonflait leurs poitrines et leur donnait le sourire. Tous les baisers, toutes les caresses, les regards. Les « je t'aime » qu'ils n'osaient pas se dire mais qui ne cessaient de se répéter au fonds d'eux-mêmes.

Alors ils pensèrent : Pourquoi ? Pourquoi ça n'a pas marché ?

 

Lentement, Milos referma les yeux rompant le contact puis il tourna les talons et partit laissant jonchés sur le sol tous les billets que Michael lui avait donné.

 

* * *

 

Quelle est la réponse ? Milos ne l'a jamais su. En fait, il en a peut-être trop mais laquelle est la vraie ? Car elles sont toutes fatalistes. Toutes vraisemblables. C'est étrange qu'il ait encore besoin de savoir car au fond même en sachant la vérité, même en l'entendant de sa bouche, qu'est-ce que ça va lui apporter ? Plus de mal que de bien. Il va retrouver ses vieux démons et ce sentiment de malaise profond qu'il a senti lorsqu'il l'a vu pour la dernière fois.

Pourtant c'est le seul chemin qu'il n'a pas emprunté, la seule manière d'être sûr d'avoir tout essayer. Malheureusement il est peu confiant quant à son efficacité, il a bien peur que jamais ça ne passera réellement. Michael était peut-être son âme sœur. Il le poursuivra toujours, même derrière des barreaux. Milos pense alors à Lysandre qui pourchasse Andreï à travers le monde.

 

L'avion se prépare à commencer sa descente, Sima boutonne la ceinture de Stella qui est paisiblement endormie. Visiblement peu à l'aise dans l'appareil, Sima s'agripper fermement aux accoudoirs sous le regard amusé et protecteur de Milos qui lui tient la main. Une fois sur terre, les passages descendent les uns après les autres, Sima portant sa fille endormie dans ses bras. Il récupère assez rapidement leurs bagages puis ils sortent enfin de l'aéroport dans un profond soupire de soulagement commun. Sima regarde tout autour de lui, son visage s'illumine malgré la pluie battante qui tombe sur la ville et le bruit des pots d'échappements des taxi qui affluent sous leurs yeux. Séparés par des milliers de kilomètres de ces bourreaux, il se sent bien plus à l'abri que sous la surveillance de la police. Pourtant comme leur a dit Koran, ils n'ont pas eu le choix. Une voiture de FBI est venue les accueillir à la sortie, il a fallu entendre un long monologue de précaution à retenir, d'adresses et noms importants. La résidence de Milos sera surveillée jusqu'à nouvel ordre. Un numéro d'urgence est donné à Sima en cas de danger. De nouveaux papiers. Une heure d'explications plus tard, la famille est jetée devant la maison.

Sima oublie rapidement l'entrevue, fasciné par la maison plongée dans la nuit. Ils n'ont pas le temps de traîner trop longtemps car la pluie est de plus en plus forte. Ils se précipitent jusqu'à la porte que Milos ouvre avec le soulagement d'être enfin chez lui. Ca sent le renfermer et il met quelques minutes à remettre les disjoncteurs en marches mais lorsqu'ils ont pu enfin allumer la lumière, tout est devenu plus chaleureux. A en juger par le sourire de son frère, Sima s'y plaît déjà. Il fait des tours sur lui-même, tenant toujours l'enfant contre lui, découvrant avec joie les cadres, les miroirs, les meubles, la couleur des tapis et les plantes mortes.

 

- Lucius a oublié de venir je suppose, soupire Milos en regardant les feuilles ocres.

- Quand je pense à la cabane dans laquelle on a vécu, sourit Sima impressionné.

- C'est pas très grand non plus. Tu aurais dû voir la villa de...Laisses tomber.

Sima secoue la tête, compatissant et amusé à la fois. Milos s'empresse de lui montrer sa chambre.

- On transformera le bureau en chambre pour Stella. En attendant elle pourra dormir avec toi. Lui dit Milos en lui ouvrant la porte.

- J'arrive pas à croire que j'ai une chambre, murmure Sima en touchant les portes de son placards.

 

Milos laisse son frère dans ses pensées découvrant les joies d'une toute nouvelle vie, ils font à deux le lit pour qu'ils puissent dormir dans des draps propres puis il se souhaitent une bonne nuit. Cette dernière est déjà bien entamée et ils sont tous épuisés par le long voyage. Sima a l'impression de rêver, le sensation des draps propres sur sa peau, de SES draps, de SON lit. L'émotion est si forte qu'il n'arrive plus à décrocher ce sourire de ses lèvres. Lui qui ne souriait jamais, il a décidément bien mal aux joues depuis peu.

 

Milos traverse le couloir et rejoint sa propre chambre, il se jette quasiment sous les couvertures, fatigué par le vol interminable et des souvenirs pas si éloignés que ça. Il s'apprête à rejoindre les bras de Morphée, aussi pressé qu'effrayé par le lendemain. 

 

 

 

 

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